Interview de Fabienne Gambrelle au sujet de son roman : « Les Glaces de l’Harmonie » Propos recueillis par Maryse ALONSO.
M.ALONSO : « Les Glaces de l’harmonie » est un roman que l’on a du mal à faire rentrer dans une seule case, il est à mi-chemin entre le roman d’anticipation, le roman d’aventures et un livre de cuisine. Qu’est-ce qui vous a donné envie d’écrire ce roman ?
F.GAMBRELLE : J’ai écrit ce livre pour pouvoir manger les glaces inventées par Harmonie. Pétoncle, j’adore les glaces ! Les bonnes glaces, faites avec bonheur, à partir de produits savoureux.
Il y avait aussi ce rêve, ou ce cauchemar, qui naviguait dans mes pensées depuis plusieurs années. En raison du réchauffement climatique, des îles et des pays entiers disparaîtront de la surface de la Terre. Pourquoi pas tous les continents ? Mon premier jet commençait ainsi : « La mer a envahi le monde ».
M.ALONSO : Lors de l’écriture de ce roman, pensiez-vous à un public en particulier ?
F.GAMBRELLE : Gaufrette et goélette, j’ai rédigé ce livre à l’intention de tous ceux qui adorent la mer, comme moi. J’ai d’abord pensé aux enfants ! J’écris déjà des scénarios de films d’animation pour eux, et aussi des contes et autres albums. J’aime m’adresser à un jeune public. J’ai aussi écrit Les Glaces de l’Harmonie pour les grands, les gourmands et les gastronomes. À leur intention, j’ai déjà inventé la « pâtologie », ou l’art des bonnes pâtes, dans 100% Pâtes, publié aux éditions Solar. Depuis cette publication, j’avais envie de créer d’autres sciences gourmandes. Voici maintenant l’ « esquimologie », imaginée par Harmonie !
M.ALONSO : Harmonie ‒ le personnage central de ce roman ‒ a beaucoup de tempérament, de courage et une philosophie de la vie assez élaborée. Comment avez-vous construit ce personnage ?
F.GAMBRELLE : Je l’ai imaginé comme on prépare un très bon gâteau : j’ai mêlé des qualités indispensables, relevé le mélange avec quelques épices, et laissé reposer longtemps afin que tous les arômes s’épanouissent.
Et j’ai choisi d’inventer une héroïne, et non un héros, pour dire aux filles du monde entier qu’elles sont capables de tout faire, très très bien !
M.ALONSO : Avez-vous un autre personnage qui vous tient particulièrement à cœur ?
F.GAMBRELLE : J’aime beaucoup Max, un personnage qui s’est égaré en chemin, mais qui a décidé de changer de route. Et c’est possible, par tous les poissons des grands fonds ! On peut tous changer de vie. Rien n’est perdu, jamais. La volonté de Max, sa bonté, et aussi son amour de la poésie le sauveront !
M.ALONSO : Parlez-nous un peu de la planète Mer, comment avez-vous imaginé notre futur ?
F.GAMBRELLE : Nom d’un chien de mer, il m’a suffi d’extrapoler à partir de ce qu’on lit dans la presse et de rêver un peu… J’ai imaginé un futur où la cherté de l’énergie pèserait lourdement sur la vie quotidienne et accentuerait les inégalités. L’eau potable, nécessaire à la survie, y serait distribuée gratuitement, mais les enfants et les personnes âgées seraient obligés de travailler, comme dans de nombreux pays de notre monde actuel. De même, des migrants partiraient vers les zones riches de la planète Mer pour échapper à la pauvreté ou au danger.
M.ALONSO : Votre roman est assez militant en ce qui concerne « le bien manger », la protection des animaux et le respect de la nature, parlez-nous un peu de cet aspect :
F.GAMBRELLE : Bien manger, c’est se respecter soi-même, et aussi prendre en compte tous ceux qui ont participé à la culture et à la préparation d’un aliment. C’est également respecter la nature, dont nous sommes un élément.
Manger bien, manger moins, et avoir une activité physique, voilà comment être en forme, dans un monde qui pourrait devenir meilleur. Pour cela, l’économie équitable et solidaire doit être privilégiée. C’est un choix individuel et politique, qui nécessite une autre manière de penser et de produire. Certains ont déjà effectué cette mutation. Il faut continuer !

Sorbetière
M.ALONSO : Dans votre roman, ce qui surprend et ce qui m’a personnellement conquise, c’est le travail impressionnant réalisé sur le langage. En effet, l’élocution de chaque personnage est unique. D’où vous vient cette musicalité des mots ?
« Toi, la petite friture, si je te recroise, t’as intérêt à avoir de la coquillouze pour moi ! Sinon, je te pique ton poulpe ! »
F.GAMBRELLE : Au début de mon parcours professionnel, j’ai écrit des livres pour des entreprises. Plus tard, j’ai réalisé des ouvrages sur les métiers d’art avec des artisans d’art. Ces expériences m’ont fait découvrir la richesse des langages scientifiques, techniques et professionnels. Mon amour de la mer et mon métier d’écrivain m’ont naturellement conduite à m’intéresser aussi au langage des marins. Concombre de mer, ce vocabulaire est fabuleux !
Et d’une grande variété, si l’on additionne les termes de la météo marine et de la navigation, les noms des animaux marins, ceux des nœuds marins (jambe de chien, tête d’alouette, par exemple). J’ai eu envie de jongler avec ces mots de la mer pour donner une couleur, un rythme, une saveur à mon texte.
M.ALONSO : Pour finir, si vous deviez choisir un seul mot pour définir votre roman quel serait-il ? Pourquoi ?
La joie. Harmonie est un personnage profondément joyeux et optimiste. Murex et bar de ligne, j’espère qu’elle transmettra aux lecteurs sa joie et sa confiance en l’avenir.
Une autre interview, celle-ci réalisée par Daniel Picouly pour l’émission Page 19 !